Zoé

Portrait de famille

 

Hochelaga-Maisonneuve (Montréal)

Maman de Simone, 4 ans et demi, Alphonse, 3 ans et demi et Lou, 19 mois

Zoé est maman à la maison de trois enfants énergiques. Elle est résolument féministe et engagée dans sa communauté.

Zoé et son conjoint ont choisi l’allaitement pour leurs enfants et, malgré les défis, ont vécu cette grande aventure positivement.

Sans hésitation, Zoé affirme que le père de ses enfants a joué un rôle central au niveau de l’allaitement.

Elle a d’ailleurs participé au projet pour lui rendre hommage et lui faire une surprise.

Maman et 3 enfants

Le choc de la réalité du premier allaitement  

« Mon premier accouchement a été magnifique, mais épuisant et déstabilisant. Après le travail, la poussée et la délivrance, je pensais que tout était fini. Ayant accouché à la maison en milieu d’après-midi, à 18 h, mes sages-femmes étaient parties et mon amoureux et moi nous nous sommes retrouvés au lit avec notre tout nouveau bébé, pris d’un léger vertige. Tout commençait alors pour moi (et pour lui) : j’avais un bébé dans les bras que je voulais allaiter et j’ai été surprise de mon état de fatigue, des douleurs de l’allaitement et du fait qu’il n’y avait rien de naturel pour moi à allaiter.

La première nuit, je ne voulais qu’une chose : dormir. Mais la première nuit, ma fille n’avait aucune envie de dormir; elle voulait boire et elle a beaucoup pleuré. Papa faisait de son mieux pour me laisser du répit et il a passé une partie de la nuit à consoler notre fille, à faire du peau à peau et à me l’amener pour que je l’allaite, toujours avec beaucoup de difficultés. Pendant une partie de la nuit, il l’a gardée sur lui pour qu’elle et moi nous nous reposions.

Le lendemain matin, mes parents sont à la maison pour rencontrer notre fille et je suis installée sur le divan devant eux à essayer d’allaiter en espérant ne pas trop souffrir. Mon amoureux s’approche doucement de moi et, calmement, m’explique comment prendre ma fille, comment tenir sa tête et son corps et quelle position doit avoir sa bouche sur mon sein. Je suis chacun de ses conseils, bouche bée.

Mes parents le regardent, tout aussi étonnés. Et les douleurs sont tellement moins fortes, je me sens soudainement moins désemparée devant mon nouveau rôle, ma fille a l’air plus calme, je suis plus calme. Cette nuit-là, quand il a tenu notre fille sur lui pour me laisser du repos, il est allé lire sur Internet tout ce qu’il pouvait trouver sur l’allaitement. Et, ce matin-là, il m’a appris à allaiter avec le plus grand amour pour moi et pour notre fille. »

Trois allaitements bien différents 

« Pour mes trois enfants, ça a été très différent. À ma première, je pensais que l’allaitement serait naturel. C’était tout, je n’avais pas d’autres représentations que ça. Et, finalement, ça a été un véritable apprentissage qui a duré tout le long de mon allaitement : combattre les gerçures, vivre le premier allaitement public, s’amuser (en rougissant) de la voir te faire partir ton réflexe d’éjection en public pour se tourner pour regarder quelque chose qui l’intrigue, apprendre à devoir être là, pour elle, être ramenée à elle peu importe dans quel état je suis, où je suis, ce que je fais, apprendre à allaiter en étant aux toilettes, en prenant un bain, en mangeant...

À mon deuxième, ça a été un peu plus facile, les débuts, comme je n’ai pas eu de gerçures, mais un défi de plus : mon garçon pleurait beaucoup, j’ai essayé des régimes d’éviction pour l’aider un peu. Passé le cap du 4 mois, il y a eu différentes phases (t’sais quand ton bébé ne veut boire que couché, par exemple, ou 10 fois par nuit à 8 mois), mais ça a été somme toute simple et agréable, et j’ai pu parfaire mes techniques. J’ai appris à allaiter en essuyant les fesses de ma grande, en la balançant au parc, en cuisinant...

Pour ma troisième, pendant la grossesse, c’était la première fois que j’avais des images d’allaitement, que j’avais hâte d’allaiter. Les allaitements de nuit des premières semaines ont été extraordinaires : de petits moments juste à nous deux où on se collait, loin du chaos diurne, ça a été notre lune de miel des premières semaines. Après, ça a été un travail d’équipe. Elle m’a suivie dans une année super mouvementée comme une grande dame, s’est fait allaiter dans toutes les positions et toutes les situations comme si de rien n’était. »

Un rôle aux multiples visages 

« Il y a autant de spécificités à ce rôle qu’il y a de papas et de familles, mais il est clair qu’un papa qui veut et peut prendre sa place, c’est extraordinaire.

Je pense que de trouver une place dans la dyade maman-bébé, de prendre des responsabilités directes par rapport au nouveau-né, c’est de s’assurer de développer un lien d’attachement fort avec son bébé et de s’assurer de rendre un peu plus doux les hauts et les bas de la première année avec bébé, mais aussi avec son amoureuse. »

Un lien qui se tisse avec le temps  

« Avec la première, ça s’est développé très rapidement [le lien d’attachement du père avec le bébé], à force de peau à peau, de moments doux, de prises de responsabilités (c’est lui qui a changé sa première couche, qui a tout appris pour passer aux lavables, qui a tellement marché dans la maison pour la consoler pendant ses pleurs du soir, qui nous a organisé tout un « set up » de cododo, etc.).

Avec le deuxième, le peu d’écart (13 mois) entre nos enfants a fait en sorte que papa s’est beaucoup occupé de notre grande et moins de notre nouveau-né. L’attachement a été plus lent, plus difficile. Il est venu plus tard, à force de sorties seul avec notre fils, à force de consoler cet enfant qu’il connaissait moins, à force d’apprendre à connaître ce drôle de coco, extraordinaire enfant.

Avec la troisième, ça a été plus rapide que notre deuxième, mais déchirant. Un nouveau travail a fait en sorte qu’il n’a pas pu prendre de congé de paternité. Il a été très pris depuis sa naissance, mais s’est souvent arrêté pour la contempler, ne serait-ce qu’une petite minute par-ci par-là, et apprendre, comme ça, à l’aimer en accéléré. Dès qu’il a pu, il a même fait des sorties professionnelles seul avec les trois enfants, dont notre dernière de pas un an dans le porte-bébé. Ce genre de grands « moves » a vraiment aidé le lien d’attachement. »

Un enfant, une crise de couple  

« Comme je dis à mes amis : un enfant, une crise de couple. À la première, même si la sexualité avait repris très vite, la « distance » entre lui et moi s’est creusée avec son retour au travail, la « déconnexion » de ce qui se passait à la maison pendant son absence, mon propre apprentissage comme maman, mes exigences d’allaiter à la demande de jour et de nuit.

Après quelque temps, on a senti le besoin de passer du temps ensemble, loin de la maison, sans notre bébé. Des soirées un peu folles où on essayait de concilier notre besoin de nous retrouver et d’en profiter le plus possible et notre volonté de ne pas laisser pleurer notre fille, et où on rentrait parfois en courant (!) du bar du coin calmer notre bébé quand ma mère n’y arrivait pas pour que je puisse l’allaiter.

Pour les deux autres, on a eu le même besoin de se retrouver, de ne pas être qu’une équipe parentale, mais une équipe d’amoureux capable de se regarder dans le blanc des yeux sans interruption, de faire la fête et d’être juste nous deux. Mais tout cela est tellement difficile à concilier avec certaines exigences parentales de ne pas « brusquer » le bébé, de ne pas le placer dans une position où il pleure parce que tu n’es pas là, même s’il se trouve avec une autre personne aimante. À un certain point, on a eu à choisir entre la santé de notre couple et nos exigences parentales! Et ça a été de très belles décisions pour notre famille. »

maman et 3 enfants

 

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et Lou dans les capsules vidéo!